L’idée de la semaine de quatre jours séduit partout, en France comme ailleurs. Travailler moins, gagner en équilibre, profiter de son temps libre tout en restant productif : sur le papier, c’est presque un rêve. Mais cette liberté nouvelle peut aussi ouvrir la porte à des dérives surprenantes. Un employeur espagnol en a fait les frais en découvrant qu’un salarié cumulait son poste avec un second emploi à plein temps, sans jamais prévenir personne. Une double vie professionnelle financée en partie par la souplesse de son entreprise.
La semaine de quatre jours
Bon nombre de Français actifs se disent favorables à l’instauration de la semaine de quatre jours. Réduire la charge horaire à 32 heures payées 35 sans perte de salaire, tout en améliorant le bien-être, a de quoi séduire. Des entreprises publiques comme privées expérimentent déjà ce modèle, parfois avec succès, parfois avec des difficultés inattendues. Car si les salariés profitent de ce temps libéré pour souffler, certains choisissent un autre chemin.
C’est le cas d’un employé de Metrickal, société de recrutement à distance basée à Barcelone. Depuis 2022, il travaillait depuis le Pérou et avait plutôt bonne réputation. Jusqu’au jour où ses résultats ont commencé à s’essouffler. Délais non tenus, clients insatisfaits, rendement en baisse. La hiérarchie a tenté le dialogue, sans grand succès.
Quand la confiance s’effrite
Pour mieux comprendre ce qui clochait, Metrickal a installé DeskTime, un logiciel de suivi du temps censé optimiser l’organisation dans le cadre de la semaine de quatre jours. L’outil a rapidement levé le voile : le salarié consacrait une bonne partie de ses heures de travail à une autre société, américaine cette fois. L’historique de navigation révélait des connexions répétées, confirmant le soupçon.
Autrement dit, la moitié de son temps payé par Metrickal était en réalité dédiée à une activité parallèle. Pas de side project personnel, pas de petit job complémentaire, mais un second poste à plein temps. Le genre de découverte qui met à mal la confiance dans une équipe réduite de dix personnes. Pour Patrick Synge, le cofondateur, la décision était claire : mettre fin à cette collaboration jugée malhonnête et préjudiciable à l’entreprise.
Les limites d’un modèle idéal
Le cas de ce salarié relance le débat autour de la semaine de quatre jours. Car si le concept séduit et s’ancre dans de plus en plus de structures, il révèle aussi ses failles. Une organisation plus souple peut profiter aux employés responsables, mais elle exige une transparence totale. Sans cela, le risque de dérive reste bien réel.
Patrick Synge ne s’oppose pas aux activités annexes de ses collaborateurs. Il encourage même la diversité des expériences, à condition qu’elles ne nuisent pas au poste principal. Mais quand un salarié détourne la moitié de son temps rémunéré pour servir un autre employeur, la ligne rouge est franchie. Son licenciement était inévitable. Ironie de l’histoire, l’homme a affiché fièrement sur LinkedIn qu’il travaillait désormais à plein temps pour la société américaine.
Cette anecdote rappelle que la semaine de quatre jours ne peut pas être qu’une réduction mécanique des heures. Elle repose sur un pacte de confiance et sur une discipline partagée. Les entreprises cherchent à offrir plus de liberté, mais attendent en retour une implication forte sur le temps de travail effectif. Dans les faits, l’équilibre est fragile. Les salariés doivent composer avec leurs envies de liberté, leurs ambitions financières, et les attentes de leur employeur.
Pour que la semaine de quatre jours tienne ses promesses, il faudra plus que des logiciels de suivi. Il faudra surtout de la clarté, des règles assumées et une culture d’entreprise qui valorise l’honnêteté. Sinon, les expériences positives risquent de se voir éclipsées par quelques dérives trop voyantes.