École privée sous contrat : le nouveau secrétaire général de l’enseignement catholique plaide pour que les enseignants puissent prier pendant les cours

Cette prise de position bouscule les règles officielles. Pire, elle enflamme le dialogue avec le ministère de l’Éducation.

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Guillaume Prévost relance la polémique en défendant la prière en classe, défiant ouvertement les règles ministérielles établies.

Guillaume Prévost a lancé une petite bombe dans le débat scolaire. Nouveau secrétaire général de l’enseignement catholique, il plaide ouvertement pour la possibilité de dire une prière en classe. Une proposition qui ne passe pas inaperçue, car elle touche à une ligne de partage sensible entre foi et enseignement. Et forcément, elle secoue autant les enseignants que les familles, partagées entre liberté religieuse et règles fixées par l’État.

Guillaume Prévost veut redonner de l’espace au religieux

Tout juste nommé à la tête de l’enseignement catholique, Guillaume Prévost a posé ses cartes sans hésiter. Il veut que les professeurs puissent vivre leur foi jusque dans la salle de classe. Il imagine une prière en classe, partagée avec les élèves, dans un esprit de liberté assumé.
Aucune pression, aucune contrainte, promet-il. « Pas d’embrigadement », martèle-t-il, mais un cadre lisible où prof et élève se sentent vraiment à leur place.

Il rappelle aussi que les écoles catholiques privées ne fonctionnent pas comme les établissements publics. Leurs enseignants n’ont pas le statut de fonctionnaires, même si leur salaire vient de l’État. Ces établissements disposent d’une marge de manœuvre, appelée leur « caractère propre ». En clair, une école catholique a le droit d’affirmer son identité religieuse tant qu’elle respecte les programmes et accueille tous les élèves. C’est dans cette brèche que Prévost veut s’engouffrer.

Il voit bien que certaines familles partent vers le hors contrat, estimant ne plus retrouver dans l’enseignement catholique sous contrat le souffle évangélique qu’elles recherchent. Il redoute que ces départs finissent par fragiliser le réseau des écoles catholiques associées à l’État. Son pari est clair : assumer plus fortement le religieux pour garder ces familles. Quitte à froisser les défenseurs d’une stricte neutralité.

L’État pose ses limites et les syndicats s’inquiètent

Face à cette sortie, le ministère de l’Éducation nationale a rapidement réagi. Pour lui, une prière en classe ne peut être envisagée que sous deux conditions. Elle doit être facultative et surtout, elle ne doit pas empiéter sur le temps des cours. Si une activité religieuse grignote sur les heures prévues par les programmes, l’établissement est tenu de compenser. C’est une règle simple mais ferme, qui rappelle la frontière entre culte et enseignement.

Les syndicats d’enseignants du privé ont accueilli ces propos avec surprise, parfois même avec stupeur. Valérie Ginet, à la tête de la Fep-CFDT, rappelle que les écoles privées sous contrat reçoivent de l’argent public. Or, la loi interdit d’utiliser des fonds publics pour financer un culte. À ses yeux, le caractère propre des établissements catholiques n’a jamais été remis en question, mais l’idée d’intégrer la prière en classe change les termes du débat. Cela bouscule un équilibre qui semblait tenir depuis longtemps.

Derrière cette controverse se joue une tension de fond. L’enseignement catholique sous contrat vit dans un espace intermédiaire, à la fois lié à l’État par ses financements et porteur d’un projet éducatif chrétien. Chaque pas de plus vers le religieux soulève la question de la limite. Et quand cette limite s’invite au cœur de la classe, au moment où le professeur se tient face à ses élèves, la discussion devient brûlante.

Un débat qui dépasse la seule école catholique

Au fond, cette affaire dépasse largement les murs des établissements concernés. Elle interroge sur ce qu’on attend de l’école, publique ou privée, dans une société marquée par la pluralité des convictions. Autoriser la prière en classe, même encadrée, ce n’est pas un simple détail. C’est ouvrir une brèche dans la manière dont la République articule liberté religieuse et neutralité scolaire.

Pour certains, c’est presque évident : une famille qui choisit l’enseignement catholique sous contrat veut que la foi garde sa place. Pour d’autres, l’idée trouble, parce que l’école sert d’abord l’instruction. Ces deux visions coexistent depuis longtemps, mais la prise de parole de Guillaume Prévost ravive le débat et lui donne une portée nouvelle.

Ce qui se joue ici touche au très intime. Des parents veulent un cadre aligné sur leurs valeurs. Des enseignants cherchent à accorder leur foi et leur métier, sans heurter personne. En face, l’État tente de tenir la ligne, pour que la liberté de chacun reste intacte. La prière en classe cristallise tout cela : désirs, peurs, principes, réalités du terrain.

On ne tranchera pas tout de suite. Cette discussion oblige surtout à nommer clairement les choses. Jusqu’où le religieux peut-il entrer dans un lieu financé par l’argent public ? À quel moment la liberté de l’un devient la contrainte de l’autre ? Et comment garder ce fil d’équilibre sans perdre l’essence de l’école : apprendre, émanciper, ouvrir l’esprit ? Les réponses viendront peut-être par étapes, au rythme des salles de classe, des équipes pédagogiques et des familles qui essaient, chaque jour, de faire tenir ensemble respect, confiance et sens.

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