De retour de Chine, un entrepreneur raconte le choc culturel : l’Europe regarde derrière, quand l’avenir exige d’oser.
On imagine souvent qu’un départ à l’étranger est le plus grand bouleversement. Quitter ses repères, apprendre une autre langue, comprendre des codes sociaux totalement différents. Mais ce qui secoue le plus, ce n’est pas toujours l’aller. C’est parfois le retour. Pour un entrepreneur espagnol installé en Chine, le choc culturel au retour en Europe a été plus brutal que l’exil lui-même.
Vivre en Asie, puis revenir en Europe
Adrián Díaz a cinquante ans passés et une carrière marquée par l’envie de tenter ailleurs. Il a choisi la Chine comme terrain de jeu, et il s’y est construit une vie, un travail, une énergie nouvelle. Là-bas, tout va vite. Les décisions se prennent en quelques heures, les services sont fluides, la digitalisation omniprésente. Un paiement, un transport, une démarche médicale : tout s’enchaîne sans cette lourdeur administrative si familière aux Européens.
À force, on prend goût à cette cadence. On s’habitue au service impeccable, aux restaurants ouverts jusque tard, aux applications qui facilitent chaque geste quotidien. Puis vient le retour. Et là, tout bascule. Adrián le raconte sans détour : il ne tient pas deux semaines sans vouloir repartir. Assis dans un café, entouré d’amis, il a l’impression de rejouer un disque usé. Les mêmes conversations, les mêmes plaintes qu’il y a vingt ans. Rien ne bouge, rien n’avance. Le choc culturel au retour en Europe se traduit autant par un sentiment d’ennui que par une frustration face à une inertie presque institutionnelle.
Une Europe qui regarde derrière, une Asie qui avance
La comparaison n’est pas tendre. En Espagne, la crise immobilière occupe les esprits depuis deux décennies, et la jeunesse peine toujours à se loger. En Chine, le marché de l’immobilier reste incertain, mais la croissance, elle, continue d’avancer. Quatre à cinq pour cent par an. De quoi nourrir un sentiment d’élan permanent, même si tout n’est pas idyllique. Adrián ne cache pas les zones d’ombre : des réglementations fragiles, des secteurs entiers où le travail au noir est toléré par les autorités. Rien n’est parfait, mais l’impression qui domine, c’est le mouvement, l’avenir, l’énergie.
En Europe, il voit au contraire une société figée dans ses normes, prudente jusqu’à l’excès. Cette prudence, qui se veut protectrice, finit par paraître paralysante. L’administration bloque, les mentalités s’accrochent au passé, et l’envie de construire semble s’éteindre. C’est cette distance qui nourrit le choc culturel au retour en Europe : on quitte un pays qui vit dans l’urgence d’innover pour retrouver un continent où l’on parle surtout des mêmes problèmes depuis trop longtemps.
Le retour devient une révélation
Tous ceux qui ont vécu longtemps ailleurs connaissent cette impression étrange : revenir « chez soi » et ne plus s’y reconnaître. Pour Adrián, ce sentiment prend la forme d’une impatience. Il aime son pays, il aime ses proches, mais il se heurte à une mentalité qu’il juge tournée vers hier plutôt que vers demain. Le choc culturel au retour ne tient pas seulement à la lenteur des services ou à la bureaucratie en Europe, mais à l’état d’esprit général. Une manière de penser le monde, plus nostalgique qu’ambitieuse.
Dans ses propos, il n’y a pas de haine, mais une lucidité amère. L’Asie lui a montré une autre façon de vivre et de travailler. L’Europe lui renvoie une image immobile, presque résignée. Et c’est ce contraste qui le pousse, encore et encore, à reprendre l’avion vers la Chine, comme on repart là où la vie semble battre plus fort.