L’indignation des Corses du Continent : « Vous trouvez normal que pour rentrer chez moi je paye le même prix que les touristes » ?

Avec des billets désormais plafonnés, les attentes s’intensifient et la diaspora réclame un accès enfin juste et équitable.

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Depuis 2021, les Corses du continent, ceux expatriés, paient le plein tarif et attendent la mise en œuvre du prix diaspora promis.

Pour beaucoup de Corses vivant loin de l’île, rentrer à la maison n’a jamais été aussi compliqué. Le billet d’avion, censé incarner la promesse de continuité territoriale, est devenu une épreuve budgétaire. Derrière cette réalité, une règle fiscale rigide ferme l’accès au tarif des résidents en Corse à ceux qui n’ont pas leur adresse principale sur l’île. La diaspora se sent oubliée, malgré des attaches fortes et des familles restées au pays.

Corse du Continent : le tarif réservée à ceux qui vivent sur place

Depuis 2021, obtenir le tarif des résidents impose une condition stricte en Corse : avoir sa résidence fiscale sur l’île. Une mesure qui paraît claire, mais dont les conséquences sociales divisent profondément. Elle exclut d’office les natifs qui ont dû partir travailler ailleurs, sans jamais couper le lien avec leur terre.

Prenons Antoine, salarié parisien. Chaque mois, il continue de payer des impôts locaux pour son appartement d’Ajaccio, qu’il entretient avec soin. Pourtant, quand vient le moment d’acheter un billet, il se retrouve privé du tarif préférentiel. Pour lui comme pour beaucoup, la règle confond résider et appartenir. Le sentiment d’injustice est palpable, car l’attache reste réelle.

Les chiffres donnent le vertige. En dernière minute, certains billets dépassent 500 euros pour un simple aller. Les déplacements imprévus, liés à des deuils ou urgences familiales, deviennent un fardeau. Ce verrou tarifaire transforme chaque retour en sacrifice financier. Pour ceux qui ont grandi sur l’île, l’accès à leur propre maison familiale ressemble désormais à un passage au péage.

Le cadre budgétaire en cause

La Collectivité a fixé de nouveaux plafonds pour encadrer les prix : 99 € TTC pour un vol « bord à bord », 199 € TTC vers Paris-Orly. Ces montants, couverts par la continuité territoriale, visent à rendre la mobilité plus accessible. Mais pour bénéficier de ces plafonds, il faut l’adresse fiscale en Corse.

Ce détail change tout. Les Corses installés sur le continent se sentent rejetés d’un dispositif financé aussi par leurs impôts. Ils voient leurs voisins insulaires profiter d’une stabilisation des prix, tandis qu’eux déboursent 500, 600, parfois 700 euros pour un trajet identique. Sur les réseaux, la colère s’organise, portée par des avocats et des figures publiques comme Jean-Baptiste Santini, qui dénoncent ces « effets pervers ».

Cette barrière alimente un sentiment de solidarité brisée. Dans le passé, certains contournaient la règle en achetant leur billet directement sur l’île pour profiter du tarif des résidents Corse du continent. Cette pratique, désormais verrouillée, a laissé place à une frustration croissante. Les témoignages s’accumulent, mêlant rancœur et fatigue.

Trouver un équilibre entre appartenance et justice tarifaire

Les élus insulaires reconnaissent le problème. Jean-Guy Talamoni lui-même évoque un « dossier sensible » qu’il faut traiter sans fragiliser le budget public. L’idée d’un tarif des résidents Corse élargi à la diaspora circule. On parle d’un futur tarif diaspora, qui prendrait en compte la réalité des parcours : travailler sur le continent tout en gardant une maison ou des parents sur l’île.

Le défi reste complexe. Comment définir l’appartenance ? Par l’adresse fiscale, par les liens familiaux, par le nombre de retours annuels ? Toute ouverture doit être encadrée, sous peine de déséquilibrer l’enveloppe de continuité territoriale. Mais ignorer cette question revient à fragiliser encore davantage les liens entre les Corses et leur île.

Chaque réservation devient une piqûre de rappel. Les familles éclatées, les racines entretenues au prix fort, les fêtes manquées faute de budget. L’attente d’un compromis nourrit l’amertume. Le futur tarif diaspora, encore à l’état de promesse, cristallise beaucoup d’espoirs.

Tant que rien ne bouge, les Corses du continent resteront coincés dans cette contradiction : appartenir à une terre qu’ils ne peuvent rejoindre qu’au prix d’une dépense excessive. Et tant que l’équilibre n’est pas trouvé, le tarif des résidents Corse continuera de séparer au lieu de rassembler.

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